Samedi 2 Octobre c’etait la POP Ouest Classic.
Quelle est cette course ? Elle sort de la tête de l’hyperactif Yvan Thuayre et de Pierre Cursan… Le concept est simple : Depart type 24h du Man et c’est partie pour 6 checkpoint dans l’enfer du Pays Basque
A chaque checkpoint vous découvrez le prochain… Un course à l’aveugle avec comme seule information : 240 km avec 6666 D+.
Voici le résumé fait par Jonathan de l’organisation qui vous raconte la course tel un historien ! (la qualité du résumé et les précisions sont incroyable)
La POP OUEST CLASSIC 2021 vue de l’intérieur,
On a aimé partager ces moments avec vous, merci pour tout Un petit retour sur cette Pop Ouest 2021 vue de l’intérieur.
4h, le réveil sonne, la nuit fût trop courte. Les étoiles brillent dans le ciel, le soleil sera donc présent, mais le coup du Sud prévu pourrait faire son entrée plus tôt que prévu. 41 coureurs se présentent au pointage, déjà 59% d’abandon avant le départ, la couleur est donnée, seuls les plus fous sont au rendez-vous. Max de Fastclub café (le café des cyclistes) sort de son oldtimer Golf 1 pimpant, deux Thermos d’un délicieux café, duquel le peloton s’abreuve avant de s’élancer dans la nuit noire. Ambiance détendue, ça parle matos, stratégie de course, certains essayent vainement de me soutirer les précieuses informations sur les CP au programme ! Des stratégies différentes, certains sont en mode gravel bike packing, faisant le choix du confort et de la sécurité pour pouvoir passer du temps dehors en montagne. D’autres ont des set-up plus épurés, roues aéro, cadre profilé, quelques barres dans le cuissard, ils prévoient de rentrer avant la nuit. Du cadre carbone, des vélos modernes, des vélos plus anciens, et aussi des petits bijoux, dont un cadre Inox sur mesure avec passage interne des gaines avec une accessoirisation full carbone mate à te décrocher la mâchoire. Une véritable sculpture, le plus beau spad de la course !
Le briefing arrive, les rictus se tendent à l’annonce du 1er CP de la journée. Pas vraiment le temps de s’échauffer, le cruel Artzamendi, la montagne de l’ours, permettra au peloton d’éclater dès les 1ers hectomètres. L’Artzamendi, 5,6km seulement, mais plus de 600+, soit près de 11% de moyenne. Au début 3km « tranquille »avec des coups de cul. Ensuite les coups de cul sont de plus en plus longs, pour attaquer les 3 derniers km, à 15%de moyenne avec une portion assassine à 19. Deux routes possibles, soit par le col de Legarré (18,6km, 1050+, 220-), soit redescendre au Pas de Roland (22km, 950+, 100-). La majorité suivront l’option 2. Il est 6h06, la course s’élance, et le rythme est déjà soutenue à l’avant dès les premières pentes après le Pas de Roland. Derrière, les diesels mettent le moteur en marche plus tranquillement. Seb Migeon est en canne, mais son DI2 en décidera autrement. Il déraille une fois, s’arrête, et repasse en tête. Il déraille une nouvelle fois. Nouvel arrêt, et remet un coup pour revenir en tête. Il aura persisté jusqu’au sommet,moyennant de nombreux arrêts, mais le moral n’y est plus. Il ne se voit pas faire les 5500m de dénivelé suivant sur un pignon de 25. Les 22km sont avalés en moins d’1h15 par la fusée Dorian Carreau, le plus jeune de la course, qui arrive 1er en haut. « Nul en bosse » comme il dit ! En regardant le CV de plus près, on voit que sur le plat c’est stratosphérique. Les écarts en haut sont déjà importants, il ne faut pas tarder et partir au CP2, le col d’Elhorietta. Ce col est plus connu des randonneurs faisant l’Autza que des cyclistes, qui eux préfèrent s’aventurer sur les pentes douces du col d’Ispeguy. Boooooring, l’esprit Pop Ouest Classic, c’est l’aventure, la découverte de routes cachés, sauvages, violentes, sans Jean-Michel et Monique dans leur camping-car qui vont faire le plein de Sangria aux ventas. Elhorietta c’est 7,8km de routes étroites, que seuls les bergers et chasseurs empruntent depuis des centaines d’années. Pas loin de 700+ à peine 8,5% de moyenne, le col le plus doux de la journée. Ou le moins violent, façon de voir les choses.
Soudain coup de téléphone de Pierre, pépin dans la descente de l’Artzamendi. Cyril, notre poète landais de l’ultra-distance a fait un tout droit dans la descente. Il grimace, et connaissant l’animal, c’est que ça doit être sérieux. Pour ce qui ne le connaissent pas, Cyril Riffault, plus connu sous le nom de Moh Risse sur les réseaux, est un coureur d’ultra-distance qui a terminé son BRM 1000 en moins de 50h récemment. Il lui a manqué 200km pour terminer la Ride Bike 2000 en 2019, une course de cadet qui comme son nom l’indique fait 2000km, et accessoirement 20000 de D+. Le genre de gars qui fait 20 000km dans l’année, soit deux fois plus que toi et ta Twingo. Le genre de gars que tu chambres sur Facebook vendredi, qui débarque le lendemain chez toi après avoir rouler 500km, siffle une bière, remets son paquet en place dans son cuissard, et retourne chez lui aussi sec pour le rôti dominical avec maman. Bref, pas un lapereau de 3 semaines. Les pompiers ont pu le transporter rapidement à Bayonne, où il devra passer un peu temps. Quelques côtes cassés, clavicules en vrac, arrachement ligamentaire, pneumothorax. Souhaitons-lui tous un retablissement rapide. PS, il aime bien la bière, donc si vous voulez lui en envoyer, contactez-nous en MP. Cela lui fera plaisir !
Dans la montée vers Elhorietta, Dorian est encore devant, mais un groupe de 4 coureurs se trouve en embuscade quelques hectomètres derrière la jeune fusée. Nous les dépassons pour prendre quelques clichés et vidéos. En haut, Dorian a disparu, Max de Fast Café, Laurent, Charles et Guillaume arrivent en tête. Une crevaison l’aura ralenti dans son élan. Il passera 5min derrière en faisant un arrêt éclair pour recoller au groupe des 4. Déjà 73kmet 2300+, pour 3h25 de course. Pas besoin de dessin, on n’est pas sur le Tourmalet, on est au Pays Basque. Derrière les écarts sont déjà importants. Des grappes de coureurs arrivent les unes derrières les autres, beaucoup me maudissent bruyamment, non moins sans humour ! L’ambiance est bonne enfant, une aventure entre copains, ça chambre dans tous les sens, c’est vraiment super à voir. D’autres constatent avec amertume la limitation de leur équipement. Impossible de monter en souplesse avec un 26 ou un 28 derrière, ça ne tiendra pas les 6666+. Pourtant les stats étaient connues. Déjà une dizaine d’abandon en haut du CP2. C’est dans la douleur que l’on apprend, que l’on grandit. Néanmoins pas vraiment d’aigreur, des coureurs contents d’avoir essayé. Ils sont venus, ils ont vu, ils ont perdu, mais ils reviendront.
Je repars avec Antoine le photographe Landais qui m’accompagnera tout au long de la journée sur le parcours,immortalisant les paysages extraordinaires de ce Pays basque, ainsi que les faciès en souffrance de nos héros du jour. Le CP3 est le col d’Urdanzia, encore une fois bien connu des randonneurs faisant le sommet du Munhoa ou de l’Ardatza, après avoir fait la chapelle de l’Oilarandoy. Niveau stat, on est sur 12,5km pour 755+. Enfin, ça c’est la version officielle depuis St Etienne de Baïgorri. A ma grande surprise, beaucoup auront choisi l’option plus sauvage, directement par Banca, en passant par la route bétonnée à 25% et la portion gravier. Cependant, avec Antoine nous ferons l’impasse sur ce CP3, et filons directement au CP4 pour faire quelques rushs dans la montée.
En effet, on commence à prendre de la hauteur, plus on s’éloigne de l’océan, et au loin les cimes du Pic d’Orhy et du pic d’Anie se dessinent, ouvrant la porte aux Pyrénées, les vraies, pas les montagnes à vaches dixit certains Beaucoup parlent, seuls les vrais savent. Aucun finishers de la Pop Ouest Classic n’utilisera plus le terme de montagne à vaches désormais. 1236m d’altitude sera donc le prochain point de passage de nos aventuriers. Une modeste altitude, mais quand on part de 200m, on se rend compte du chantier.
Encore une fois plusieurs options s’offrent aux coureurs. La version classique, en retournant à St Jean Pied de Port et en passant par la route des pèlerins de St Jacques. 18km, 1100+, un petit 6% de moyenne mais une portion centrale très violente sur 3km avec du 17%. La fin est plus tranquille une fois la vierge d’Osson en vue, et fait place à un des plus beaux panoramas de la course entre le col d’Elhursaro et notre CP4, le col d’Arnosteguy. Les Pyrénéens supérieurs parleraient pompeusement d’un « cirque ». Ici en Pyrénées inférieures, on préfère se taire. OK, ça chambre, c’est de bonne guerre !
Au final peu de coureurs auront choisi cette version, ils auront préféré couper au plus court en passant par Arnéguy, les plus vicieux poussant même le vice par choisir l’option 2 bis par le col de Beillurti. A moins d’avoir une VO2 max de C15, personne ne passe par là normalement, ou alors en descente après avoir fait le col d’Elhursaro par Ondarole (option 2) histoire de faire une boucle. Une portion gravier de plus, une course poursuite avec un Patou, enragé selon la CGT Girondine, un peu taquin selon la police Basque, aura permis à nos artistes d’atteindre le col d’Arnosteguy, le tout dans un vent de Sud dantesque qui s’est malheureusement bien levé comme prévu. Le ressenti est encore plus violent sur les crètes frontalières que dans la vallée, et malheureusement, c’est sur ce fil de crêtes que le parcours va continuer.
Les positions commencent à se confirmer. Max et Laurent sont en duo, ils arrivent ensemble au CP4 et semblent vraiment détendus. Max c’est le genre de mec à te sortir 1 vanne par seconde, avec un jeu de mot intercalé dans la demi-seconde suivante. Une boule de bonne humeur en somme. Il s’occupe du Fastclub Café, qui comme son nom l’indique, propose des cafés excellents, mais aussi une boutique de matos du cycliste très sympa et arty, un peu à l’image de Max encore une fois. Accessoirement, le loustic a terminé 4ème la BikingMan Euskadi il y a 3 semaines, une boucherie sans nom en 3 étapes de 1000km pour 23 000 de D+ qu’il boucle en 72 petites heures. Le plus dur selon lui aura été non pas la distance ou le dénivelé, mais sa playlist de 20 chansons seulement. Bref, il balance autant de vannes que de watts.
Laurent n’est pas un anonyme non plus, le gars sait pédaler. Il a récemment bouclé la Race Across France, encore un truc sans nom avec 2500km sur la balance. Il a mis 7 jours, en regardant le paysage. Ils se sont bien trouvés avec Max à qui il renvoie parfaitement la balle niveau déconnade. Amateur du 1er degré, allez donc jouer au Molky sur l’autoroute. Même si un des piliers de la Pop Ouest c’est l’aventure en autonomie, nous nous sommes autorisés à organiser quelques petits ravitaillements minimalistes surprises. Vu les conditions climatiques et ce fichu coup de Foehn, la vue des boissons sucrés américaines et autres bonbons allemands gélatineux aura permis à beaucoup de reprendre le moral et de repartir dans le vent brutal. Profitant de cette aubaine, Laurent et Max se font alors rattraper par Guillaume et Charles. Guillaume, membre de la fameuse Lémur Team, et frère de Nicolas Darmaillacq, a participé à l’organisation de la SkyRhune le week-end précédent. Pour ceux qui ont passé les 5 dernières années dans une grotte, la SkyRhune est la plus grande course de Skyrunning du monde avec Zegama, et de loin (on n’est pas chauvin, on est réaliste). Quant à lui Charles est coursier pour « La Course », les As de la livraison à Bayonne, entreprise crée par Olivier, aussi participant de cette Pop Ouest Classic et des éditions précédentes. Franchement on adore le concept. Basta la livraison de proximité en camionnette diesel qui fume noire, les mecs en double-file qui te bloquent le trottoir. Ici c’est à la force du cuissot que les plis et colis arrivent en express à leur destinataire. C’est rapide, c’est flexible, c’est pas cher, c’est écologique, et accessoirement ça permet à leurs coursiers comme Charles ou Will (non partant cette année) d’envoyer des gros watts dans les montées. Guillaume et Charles repartent ensemble à l’assaut de la descente vers la source de la Nive pour attaquer le CP5. Peu de temps après, arrivent nos deux jeunes de la course, Dorian, qui a réussi à tenir malgré la baisse de moral, et Romain. Comme expliqué avant, c’est une 1ère pour Dorian sur ce type de format, il est plus habitué à truster les podiums au niveau national sur les chronos en saison. A Arnosteguy, on est à 120km et 4500+/3100-, son plus gros ratio distance dénivelé. Il faut avoir un sacré mental pour continuer une course sans plaisir, et il semble que son binôme avec Romain le Tarbais lui permette de s’accrocher. Stratégie gagnante, c’est ça aussi le principe de la POC. Romain, malgré son jeune âge, et quant à lui déjà un habitué de ce genre de défi. Lui et son papa étaient d’ailleurs présents sur l’édition 2019 de la POC. Il a bouclé la French Divide, « quasiment en slip » dixit ses parents présents au CP (désolé on vend la mèche en exclusivité). La French Divide c’est une petite course de quartier de 2200km et 35000+ reliant Bray-Dune dans le Pas de Calais au Pays Basque. Il arrive au CP vraiment relax malgré les éléments qui se déchainent de plus en plus. Dorian ne peut plus rien avaler ni boire, le bide en vrac. Romain picore ici où là, et ils repartent assez vite comparer aux 2 autres groupes précédents qui se sont attardés un peu plus.
Nous décidons alors avec Antoine notre ami photographe de partir au CP5 et prendre quelques clichés du top 6dans la montée. Et quelle montée. Comme les locaux l’ont deviné au CP3 en prenant connaissance du CP4 au col d’Arnosteguy, le CP5 sera Errozaté. Un enchaînement classique de cols du secteur souvent emprunté par les coureurs basques français ou espagnols en manque de dénivelé. Un enchaînement également au programme de la splendide Irati Xtrem. En effet, Après les 1100+ d’Arnosteguy, on remet 1000m de dénivelé positif de plus dans la musette, le tout sur moins de 10km. Puis vu que vous avez passé le CM2 et que les divisions n’ont plus aucun secret, on reste sur des pentes avec des pourcentages à 2 chiffres très souvent, avec une portion à 20% même. Et évidemment, comme si les statistiques n’étaient pas assez parlantes, le vent de face faisait rage. La route permettant d’accéder à la bretelle montant à Errozate, la D301, est également une route classique connue internationalement par les motards et autres amateurs de rallye auto. Mais ils le font souvent en sens inverse, en montant par Mendive, Burdinkurutxeta et le très scénique col d’Irau à côté d’Okabé et ses menhirs.
D’ailleurs nous avons pu croiser en sens inverse de nombreuses voitures très anciennes, volant à droite, conducteurs aux tempes blanches, avec gants et casques en cuir d’époque. « Oh Darling, what a fantastic journey » ! Le thermos de thé était certainement dans la malle arrière. Oui on dit « malle » sur ce genre de bagnole, un coffre c’est pour une Renaut 21.Antoine et moi nous postons à des endroits stratégiques nous permettant de shooter nos grimpeurs fous sur fond panoramique de dingue. Nous retrouvons Max et Laurent, penché quasiment à 45° pour contrer le fort vent de côté. Max avec son cadre et ses roues aéro sont à la peine. Ils nous ont confié être tombé et avoir dû marcher au plus fort des bourrasques. Leur vélo en carbone léger se sont littéralement envolés, obligés de les coucher au sol et de les maintenir fermement. Laurent aura perdu ses lunettes dans la bataille. « C’étaient les lunettes ou le vélo, j’ai fait le bon choix je pense » lancera Laurent non moins sans humour une fois au CP5. Les écarts commencent à être conséquents, Guillaume arrive au CP5 une bonne heure après Max et Laurent. Charles le suit à 5 minutes. Guillaume semble plus détendu que Charles, qui est tombé à plusieurs reprises, mais il a du mental le coursier. Guillaume accorde beaucoup d’importance à la qualité de ses ravitaillements, il prend bien son temps pour s’alimenter correctement, la maturité on appelle ça. Ils repartiront ensemble vers le CP6. C’est également bien plus prudent étant donné les conditions de vent dantesques.
Une heure après, nous voyons poindre au loin Romain et Dorian, toujours ensemble. Dorian semble un peu plus positif, et Romain toujours aussi en contrôle. Ils repartent sans trop attendre à l’assaut du 6ème et dernier CP. Une petite heure plus tard, nous voyons arriver Franck, notre ultra-runner et avant tout ami de Bordeaux. Des douleurs récurrentes l’ont éloigné des courses de trail assassines pour les articulations, il est donc revenu à son amour de jeunesse, la bicyclette. Sa femme Martine, et avant tout notre amie, aura été présente sur chaque CP et nous aura bien aidé pour l’organisation au pied levé de cette POC. Merci Martinaaaa ! Comme Franck ne fait jamais les choses à moitié, la sortie du dimanche a vite été d’un ennui pesant pour lui. Il est donc parti sur des formats bien plus longs, avec un petit 700km il y a peu. Quand il s’ennuie, Martine prend le van pour aller s’entrainer en trail dans les Pyrénées, et lui la rejoint à vélo depuis Bordeaux. Une sortie longue tout au plus. Et récemment, il a investi dans un gravel, pour une nouvelle fois explorer de nouveaux horizons, une nouvelle pratique. Et je suis sûr que dans ses cartons il a certainement 1000 projets qui attendent de voir le jour. Il repartira vers le CP6 juste devant le 8ème concurrent arrivant au CP5, un membre du célèbre PPA, le Pau Pyrénées Aventure, association organisatrice de l’évènement éponyme le Raid PPA. Ils organisent aussi avec succès une course de trail magnifique, le Grand Trail de la Vallée d’Ossau, ains qu’un triathlon.
D’ailleurs ce CP6, où se situe-t ’il ? J’aurai « la bonne idée » de le poser au niveau du col d’Aphanize. En effet une fois à Errozate, il est intéressant de rejoindre les fameux chalets d’Iraty, station de montagne bien connue de la région, dans le but de se ravitailler. En effet, depuis Arnéguy, les coureurs n’ont croisé aucun village. Certains ont dû débourser 3 euros pour quémander de l’eau au Source de la Nive, no comment. A Iraty, il y a une épicerie, une machine à café à pièce, et un bar/restaurant au fameux col de Bargagui. Ce même col que nous avions pu prendre sur l’édition 2019, mais en sens inverse au départ de Larrau. En mettant Aphanize en CP6, nous avons joué la sécurité en permettant donc aux coureurs un peu légers sur leur ravitaillement de faire le plein, voire de trouver un abri pour passer la nuit. Puis bon, fini les pentes assassines interminables, on est sur du standard. En bifurquant sur la gauche, une petite route pastorale magnifique permet de relier Iraty à Ahusquy (le casse-crouteest divin là-bas), le col d ’Aphanize se trouvant alors un peu plus loin au pied du pic du Béhorléguy. Ce pic est bien connu, car lorsque l’on arrive de l’océan en voiture, il a une forme de triangle pointu parfait très caractéristique, comme ces montagnes que dessinent les enfants. Une magnifique course de trail s’y déroule également, le Tutturru Trail, avec un 21km, un 42km, et un Kilomètre vertical où l’on accède d’ailleurs au sommet du Béhorléguy. Son sympathique organisateur était aussi sur la POC ! La portion de route après Aphanize est d’une beauté insolente, et la descente sur Mendive est très technique. Ensuite il ne reste plus qu’à nos héros de revenir en faux plat descendant par la vallée. Enfin, ça c’est sur la brochure en papier glacée en direct de mon canapé, la réalité fût différente. Le temps passe, Antoine et moi décidons de laisser notre compère Gael au CP5 pour accueillir les vainqueurs à Souraïde. Nous ferons donc l’impasse sur le CP6. Nous rebroussons chemin pour prendre d’autres clichés des concurrents suivants. Le vent est bien trop violent, beaucoup de coureurs sont en mode survie. Ils feront le choix couteux mais non moins courageux d’arrêter dans cette montée du CP5, ou au CP5 pour rejoindre la vallée par Estérençuby. Il faut savoir admettre ses limites, renoncer est aussi une force.
Au détour des coureurs, un grand colosse, plus avec une allure de rugbymen que de cycliste, en maillot BIC vintage, marche à côté de son vélo, le visage marqué. C’est notre ami organisateur du Ttutturu Trail à Mendive. A côté de lui, une petite fille l’encourage. Il est originaire de la vallée juste en bas, il est chez lui ici, au bord de la Nive. J’imagine la dimension spirituelle forte que peut revêtir ce genre de défi derrière la maison, sur ces routes qu’il a dû arpenter maintes et maintes fois. Il ne veut rien lâcher. J’avais pu le croiser au CP2, où ses collègues participant également à la course le chambraient à cause de son développement trop gros. « Il est en 28, et encore il était en 24 il y a 2 jours !! ». Une sacrée équipe de déconneurs qui ont mis une super ambiance, mais qui savent aussi appuyer fort sur les pédales ! C’est aussi ça le Pays Basque, cet esprit 3ème mi-temps de Rugby, mais lors du match on va au charbon. Ils rentreront tous sagement après le CP5 pour profiter de la fin de soirée et du repas. D’ailleurs, en parlant de repas, un énorme merci à notre ami Laurent, venu tout spécialement du Lot et Garonne pour nous concocter un couscous délicieux et très réconfortant après plus de 15h de selle, voire 21h pour les derniers finisheurs.
Antoine et moi arrivons juste à temps à Souraïde pour acclamer Max et Laurent qui finissent main dans la main. Ils auront avalé les 240km et 6700 de D+ en un peu plus de 12h. Ils ont toujours le smile, et refont le match sur Aphanize. « L’apocalypse », « un truc de malade », « du grand n’importe quoi », mais tout en se marrant. En contrôle quoi. Le retour le vent dans le dos les auront soulagés après toutes ces heures avec le vent de côté ou de face. Arriveront bien plus tard nos compères Guillaume et Charles, bien content d’en finir à leur tour. Si Guillaume semble frais, Charles aura besoin d’une pause de 30 minutes pour retrouver des couleurs. Nos amis Dorian et Romain suivront un peu après, fier d’avoir bouclé cette aventure. Ils sont accueillis par leurs proches qui sont bien contents de les voire arriver dans la nuit. Bravo les « digital natives », vous êtes des guerriers ! Encore un peu après arrivera notre amis Franck, super fier de sa performance XXL du jour. Il était entraîné, il était prêt, il a fini.
Finalement, 16 coureurs poinçonneront leur passeport à la balise du CP6 et seront finishers de cette Pop Ouest Classic 2021, les 1ers à 18h30, les derniers à 3h30. Ce fichu coup de Foehn aura été le juge de paix qui précipitera beaucoup de coureurs vers la porte de sortie. 100 inscrits, 41 au départ, toujours une trentaine au CP4, et 25 au CP5. Le vent faisait rage sur les crêtes, apparemment 120km/h en fin de soirée sur Iraty, et 180km/h lors du coup de tabac au milieu de la nuit. Beaucoup ont dû faire une partie de la descente vers Mendive en marchant, les bourrasques les emportant sur le bas-côté. Le mot course aventure prend alors tout son sens. Ce n’est plus du vraiment du cyclisme c’est de la gestion, certains diront de la survie. C’est aussi cela que les coureurs avec qui nous avons pu discuter à la POC viennent chercher. Une confrontation avec eux-mêmes. Face à la pente, face à la distance, face aux éléments, face à la faim ou la soif. Ou face à un Patou menaçant et aux beuglements du directeur de la course Yvan L’apéro d’arrivée et le couscous concocté par Laurent auront permis aux participants, finisheurs ou pas, et leurs accompagnants, de retrouver des couleurs. Chacun refait le match, en parlant de ses coups de mou, de son choix de trace, de son choix de matos, de la beauté des paysages ici ou là, de la difficulté du parcours, de ses courses précédentes, ses projets futurs, et évidemment de ce put… de vent de Sud. J’me suis alors mis en retrait un instant, je n’arrivais plus à capter le détail de leurs discussions. Je les ai tous regardé, ils avaient tous des histoires plein la tête, les yeux qui brillaient.
C’est un sentiment extraordinaire de ce dire qu’on a pu contribuer, avec cette Pop Ouest Classic, humblement, à rendre une poignée de fada passionnés heureux au moins quelques minutes, et je l’espère plus longtemps.
Jonathan Pierre, Yvan et les bénévoles
L’activité sur strava : https://www.strava.com/activities/6053551596